Lettre au Président de la République en date du 18 janvier 2001

18 janvier 2001

CONSEIL SUPERIEUR
DE LA MAGISTRATURE

15, quai Branly
75007 PARIS

Paris, le 18 janvier 2001

Monsieur le Président de la République,

Au cours des dernières semaines, des attaques violentes et réitérées ont été portées contre des magistrats, à l'occasion de procédures judiciaires qu'ils étaient chargés de conduire, leur imputant la volonté d'utiliser leurs fonctions à des fins étrangères à l'objet de celles-ci.

Dans ce contexte il nous parait utile de rappeler quelques principes essentiels au bon fonctionnement des institutions et plus particulièrement à la garantie de l'indépendance de l'autorité judiciaire, à laquelle nous avons la charge de contribuer à vos côtés.

L'institution judiciaire ne doit pas être à l'abri des critiques dès lors que celles-ci s'expriment dans les limites prévues par la loi et dans le respect des personnes.

Il n'en est pas moins essentiel que la justice puisse accomplir sa mission en toute sérénité.

De ce point de vue certaines attaques, alors surtout qu'elles émanent de personnes exerçant des responsabilités publiques, dépassent la mesure en raison soit de leur objet soit de leur forme.

La mise en cause collective ou personnelle des magistrats, notamment des juges d'instruction, ne saurait être tolérée alors que ces magistrats ne font qu'exercer, sous réserve des voies de recours prévues par la loi, la mission que celle-ci leur confie.

Ainsi que vous l'avez rappelé avec force le 5 janvier 2001 devant les corps constitués "l'esprit de justice commence par le respect du droit et par le respect de ceux qui disent le droit". Et, comme l'a dit le garde des sceaux à la presse le 17 janvier "les attaques personnelles contre les juges, si elles ne sont pas nouvelles, restent inacceptables".

Elles le sont d'autant plus que les magistrats ainsi attaqués sont en fait privés de tout droit de réplique.

Ces magistrats sont en droit de compter, en revanche, sur la protection effective de l'Etat.

C'est la raison pour laquelle, réunis ce jour en formation plénière nous tenions, Monsieur le Président de la République, à vous faire part de notre préoccupation ainsi que de notre position sur ces questions, qui touchent aux valeurs fondamentales de notre République.