Communication du 12 mai 2020

12 mai 2020
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- COMMUNIQUÉ -

 

Notre pays traverse une crise exceptionnelle, qui affecte et affectera durablement notre société dans ses dimensions humaines, politiques, économiques ou culturelles. Dans un tel contexte, l’Etat de droit constitue plus que jamais la condition de notre démocratie. Parce que les magistrats sont les indispensables garants de cet Etat de droit, la période qui s’ouvre confronte la justice à un double défi : occuper pleinement sa place dans l’espace public, et poursuivre sa mission de protection de la liberté individuelle.

 

La justice devra occuper pleinement sa place dans l’espace public

La demande de justice, au sein des familles, dans le monde du travail, dans les relations commerciales, dans la cité, n’a cessé d’augmenter au cours des dernières décennies. La situation sanitaire va engendrer des difficultés économiques, sociales et individuelles qui renforceront encore ce besoin de justice. Dans une période d’affaiblissement des autres modes de régulation des rapports sociaux, ce recours accru à la justice conduira nécessairement à débattre de sa place dans la société.

Mais dans l’immédiat, le premier défi sera celui de la capacité de l’institution judiciaire à poursuivre son rôle de régulation, dans un contexte dégradé. Dans les juridictions, le nombre des affaires à juger a souvent atteint un niveau critique tandis que le caractère nécessairement progressif de la reprise de l’activité rendra difficile leur traitement dans des délais satisfaisants. Il appartiendra pourtant aux magistrats et aux greffes, en collaboration avec les auxiliaires de justice, de relever ce défi : il en va de la confiance que les citoyens doivent pouvoir placer dans leur justice et, au-delà, dans leurs institutions. Il reviendra, dans le même temps, à l’Etat de fournir à l’institution judiciaire tous les moyens de son fonctionnement malgré un contexte budgétaire difficile.

 

La justice devra poursuivre sa mission de protection de la liberté individuelle

Le second défi sera celui de la poursuite par les magistrats de leur mission de protection de la liberté individuelle, avec toute l’indépendance que leur confère leur statut. Cette mission, essentielle à l’Etat de droit, devient encore plus cruciale en période d’état d’urgence, puis en sortie de cet état : il ne peut être toléré d’exception à la prévalence de la règle de droit. Or, malgré l’engagement des magistrats et des fonctionnaires dans la conduite de leurs missions essentielles, l’état d’urgence sanitaire a largement contrarié le cours normal de la justice. Des adaptations importantes, tant des procédures que des méthodes de travail, ont été introduites. Lorsqu’elles se traduisent par une dégradation des conditions d’accès à la justice ou une altération de la qualité du débat judiciaire, elles ne sauraient se perpétuer. Pour que la justice demeure inscrite au cœur de la cité, elle doit rester proche du justiciable et être incarnée par le juge.

 

Chargé par la Constitution d'assister le Président de la République dans son rôle de garant de l'indépendance de la justice, le Conseil supérieur de la magistrature, convaincu de la volonté et de la capacité des acteurs de la justice à répondre aux attentes de nos concitoyens dans un contexte difficile, maintiendra la plus grande vigilance pour permettre aux magistrats de remplir leur exigeante mission.

 

English version : Release of 12 May 2020

- RELEASE -

 

Our country is going through an exceptional crisis, which is affecting and will continue to affect our society in its human, political, economic and cultural dimensions. In such a context, the rule of law is more than ever the condition of our democracy. Because judges are the indispensable guarantors of this rule of law, the period that is opening up confronts justice with a twofold challenge: to fully occupy its place in the public arena and to continue its mission of protecting individual freedom.

 

Justice must take its rightful place in the public arena

 

The demand for justice, within families, in the world of work, in commercial relations, in the city, has not ceased to increase in recent decades. The health situation will generate economic, social and individual difficulties that will further strengthen this need for justice. At a time when other means of regulating social relations are weakening, this increased recourse to justice will necessarily lead to a debate on its place in society.

However, in the immediate future, the first challenge will be the capacity of the judicial institution to continue its regulatory role in a deteriorated context. In the courts, the number of cases to be judged has often reached a critical level, while the necessarily gradual nature of the resumption of activity will make it difficult to deal with them in a satisfactory timeframe. However, it will be up to the judges and clerks, in collaboration with the court officers, to meet this challenge. It is a question of the trust that citizens must be able to place in their justice system and, beyond that, in their institutions. At the same time, it will be up to the State to provide the judicial institution with all the resources it needs to function despite a difficult budgetary context.

Justice must continue its mission to protect individual freedom.

The second challenge will be for judges to continue their mission of protecting individual freedom, with all the independence that their status confers. This mission, which is essential to the rule of law, becomes even more crucial during a state of emergency, and then when the state of emergency ends: no exception to the rule of law can be tolerated. Nevertheless, despite the commitment of magistrates [judges and prosecutors] and civil servants in carrying out their essential missions, the state of health emergency has largely thwarted the normal course of justice. Significant adaptations to both procedures and working methods have been introduced. When they result in a deterioration of the conditions of access to justice or an alteration in the quality of the judicial debate, they cannot be perpetuated. If justice is to remain at the heart of the city, it must remain close to those subject to trial and be embodied by the judge.

Charged by the Constitution with assisting the President of the Republic in his role as guarantor of the independence of the judiciary, the High Council for the Judiciary, convinced of the willingness and ability of those involved in the justice system to meet the expectations of our fellow citizens in a difficult context, will maintain the utmost vigilance to enable judges to fulfil their demanding mission.