Décision du Conseil d'Etat

Date
14/11/2022
Qualification(s) disciplinaire(s)
Atteinte à l'image de la justice, Manquement à l'honneur, à la délicatesse et à la dignité du magistrat, Manquement au devoir de délicatesse, Manquement aux devoirs de l'état de magistrat, Manquement au devoir de légalité (obligation de diligence), devoir de probité, Manquement au devoir de probité (devoir de loyauté à l’égard de l’institution judiciaire)
Décision
Non admission du pourvoi
Mots-clés
Délicatesse
Probité
Dignité
Diligence
Image de la justice
conscience professionnelle
point de départ de la prescription
connaissance effective des faits
insuffisance professionnelle
Comportement inadapté
police de l’audience
animation et coordination d’un service
coordinateur
président d’audience
renvoi d’audience
saisine initiale
saisine complémentaire
étendue de la saisine
fiche de poste
pourvoi
non admission du pourvoi
Conseil d’Etat
Fonction
premier vice-président
Résumé
Le 5 novembre 2021, le Conseil supérieur de la magistrature a prononcé à l’encontre du magistrat la sanction disciplinaire du déplacement d’office. Un pourvoi et un mémoire complémentaires étaient adressés au Conseil d’Etat les 5 janvier et 5 avril 2022 aux fins notamment d’annulation de ladite décision. Par décision du 14 octobre 2022, le Conseil d’Etat a considéré qu’aucun des moyens soulevés par le magistrat n’était de nature à permettre l’admission du pourvoi.
Décision(s) associée(s)

  Conseil d'État

N° 460163
ECLI:FR:CECHS:2022:460163.20221014
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre
Mme Catherine Moreau, rapporteur
M. Nicolas Agnoux, rapporteur public
SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY, avocats

Lecture du vendredi 14 octobre 2022

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


Vu les procédures suivantes :

I. Sous le n° 460163, par une décision du 5 novembre 2021, le Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, a prononcé à l'encontre de M. A... B..., premier vice-président au tribunal judiciaire de Fort-de-France, la sanction disciplinaire du déplacement d'office.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 janvier et 5 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Sous le n° 462902, par une requête enregistrée le 4 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du Président de la République du 4 février 2022 le nommant premier vice-président adjoint au tribunal judiciaire de Créteil.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;
- le code de l'organisation judiciaire ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir, d'une part, de la décision du 5 novembre 2021 du Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, ayant prononcé à son encontre la sanction du déplacement d'office, d'autre part, du décret du Président de la République du 4 février 2022 le nommant au tribunal judiciaire de Créteil. Ces demandes portant sur la situation d'un même magistrat, il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision.

Sur le pourvoi contre la décision du Conseil supérieur de la magistrature :

2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

3. Pour demander l'annulation de la décision du Conseil supérieur de la magistrature, statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège, qu'il attaque, M. B... soutient que :
- cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'elle a été rendue au terme d'un délai excessivement long et d'une procédure qui n'a pas été équitable, ni impartiale, pour l'enquête administrative comme pour l'enquête disciplinaire menée par un magistrat qui n'était pas d'un rang au moins égal au sien ;
- les faits retenus à son encontre pour caractériser le manquement au devoir de diligence, tirés de ce qu'il n'aurait pas rempli une partie des missions dévolues au coordonnateur d'un service et de prétendues difficultés relationnelles avec les autres magistrats de la chambre correctionnelle, sont entachés d'inexactitude matérielle ;
- les faits retenus pour caractériser le manquement aux devoirs de dignité et de délicatesse ne présentent pas un caractère fautif et ne sont pas de nature à justifier la sanction qui lui a été infligée ;
- la prise en compte d'un manquement de sa part à l'exigence de conscience professionnelle procède d'une erreur de droit et d'une irrégularité de procédure et se fonde sur des retards qui ne sauraient caractériser une faute de nature à justifier une sanction ;
- la sanction du déplacement d'office est disproportionnée.

4. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

Sur la requête contre le décret du 4 février 2022 du Président de la République nommant M. B... au tribunal judiciaire de Créteil :

5. En premier lieu, il ressort des mentions de l'ampliation du décret, certifiée conforme par la secrétaire générale du Gouvernement, que le décret attaqué a été signé par le Président de la République et contresigné par le garde des sceaux, ministre de la justice. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait été pris par une autorité incompétente ne peut qu'être écarté.

6. En deuxième lieu, au soutien de son moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le requérant se borne à indiquer qu'il était auparavant domicilié en outre-mer et que l'ensemble de sa famille y réside. En l'absence de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, ce moyen doit être écarté.

7. En troisième lieu, il résulte de ce qui est dit au point 4 sur le pourvoi dirigé contre la décision du Conseil supérieur de la magistrature ayant prononcé la sanction du déplacement d'office à l'encontre de M. B... que le moyen tiré de ce que le décret pris pour l'exécution de cette décision devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de celle-ci ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. B... contre le décret du 4 février 2022 doit être rejetée.

D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi n° 460163 de M. B... n'est pas admis.
Article 2 : La requête n° 462902 de M. B... est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à la Première ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré à l'issue de la séance du 15 septembre 2022 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 14 octobre 2022.

La présidente :
Signé : Mme Isabelle de Silva

La rapporteure :
Signé : Mme Catherine Moreau
La secrétaire :
Signé : Mme Valérie Peyrisse