Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
19/01/2004
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir de délicatesse à l’égard des justiciables, Manquement au devoir de probité (devoir de respecter les exigences des bonnes mœurs), Manquement au devoir de probité (obligation de préserver la dignité de sa charge), Manquement au devoir de probité (devoir de maintenir la confiance du justiciable envers l’institution judiciaire)
Décision
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Mots-clés
Actes sexuels
Mineur
Image de la justice
Délicatesse
Justiciable
Probité
Bonnes mœurs
Dignité
Institution judiciaire (confiance)
Interdiction temporaire de l'exercice des fonctions
Juge des enfants
Fonction
Juge des enfants
Résumé
Actes à caractère sexuel commis par un juge des enfants, dans l’exercice de ses fonctions, à l’égard de deux mères d’enfants mineurs soumis à sa juridiction
Décision(s) associée(s)

Le Conseil supérieur de la magistrature réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège et siégeant à la Cour de cassation ;

Vu les articles 50, 50-2 et 51, alinéa 3, de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée notamment par les lois organiques n° 92-189 du 25 février 1992 et n° 2001-539 du 25 juin 2001 ;

Vu les articles 40 à 44 du décret n° 94-199 du 9 mars 1994, relatif au Conseil supérieur de la magistrature ;

Vu la lettre adressée le 16 décembre 2003 au Conseil supérieur de la magistrature par le premier président de la cour d’appel de V, lui dénonçant les faits motivant des poursuites disciplinaires contre M. X, juge des enfants au tribunal de première instance de V, ainsi que les pièces jointes à cette lettre ;

Vu la lettre du 12 janvier 2004 du premier président de la cour d’appel de V, ainsi que la pièce jointe à cette dépêche ;

Vu la convocation notifiée à M. X, le 31 décembre 2003, l’informant que le Conseil supérieur de la magistrature se réunirait le 15 janvier 2004, à 11 heures, en vue d’une éventuelle application de l’article 51, alinéa 3, de l’ordonnance du 22 décembre 1958 et l’invitant à se présenter à cette séance pour y présenter sa défense ;

Vu la lettre du 6 janvier 2004 par laquelle M. X a désigné Me Jean-Yves Le Borgne, avocat au barreau de Paris, pour l’assister à cette séance ;

Vu la communication de la procédure à M. X et à son avocat qui en a reçu copie ;

Après avoir entendu, le 15 janvier 2004, à 11 heures :
- M. Patrice Davost, directeur des services judiciaires, assisté de Mme Florence Butin, magistrate à l’administration centrale du ministère de la justice ;
- M. Jean-Yves Le Borgne, avocat au barreau de Paris, assistant M. X, qui a été entendu en ses explications et qui a eu la parole en dernier ;

Attendu que par la lettre susvisée, le premier président de la cour d’appel de V a dénoncé au Conseil supérieur de la magistrature des faits motivant des poursuites disciplinaires contre M. X, juge des enfants au tribunal de première instance de V, et consistant en des actes de caractère sexuel, commis, entre les mois de juillet et octobre 2003, à son cabinet, dans l’exercice de ses fonctions, à l’égard de deux mères d’enfants mineurs soumis à sa juridiction ; que ces faits, portés à la connaissance du premier président de la cour d’appel et du procureur de la République par l’autre juge des enfants du même tribunal et le chef du service des affaires sociales du ministère de la solidarité de …, ainsi que par les plaintes des personnes intéressées, ont donné lieu à une enquête préliminaire ;

Attendu qu’aux termes de l’article 51, alinéa 3, de l’ordonnance du 22 décembre 1958, le Conseil supérieur de la magistrature peut interdire au magistrat incriminé, même avant communication de son dossier, l’exercice de ses fonctions jusqu’à décision définitive ;

Attendu que la nature des faits imputés à M. X et leur divulgation au sein de la juridiction à laquelle il appartient, des services sociaux et des services de gendarmerie locaux s’opposent à ce que M. X poursuive désormais avec la sérénité, la confiance et le crédit nécessaires, l’exercice de toute activité juridictionnelle au sein de ladite juridiction ; que ces circonstances caractérisent l’urgence justifiant que, dans l’intérêt du service, soit interdit au magistrat en cause l’exercice de ses fonctions jusqu’à décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;

Par ces motifs,

Interdit temporairement à M. X l’exercice de ses fonctions de juge des enfants au tribunal de première instance de V jusqu’à ce qu’intervienne une décision définitive sur les poursuites disciplinaires ;

Dit que copie de la présente décision sera adressée au premier président de la cour d’appel de V.