Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du siège

Date
09/07/1959
Qualification(s) disciplinaire(s)
Manquement au devoir de probité (devoir de loyauté à l’égard de l’institution judiciaire)
Décision
Mise à la retraite d'office
Mots-clés
Argent
Probité
Institution judiciaire (loyauté)
Juge d'instruction
Mise à la retraite d'office
Fonction
juge d'instruction
Résumé
Utilisation à des fins personnelles de sommes d’argent qui avaient été confiées au magistrat dans le cadre de ses fonctions

Le Conseil supérieur de la magistrature, réuni comme conseil de discipline des magistrats du siège, sous la présidence du premier président de la Cour de cassation, et statuant à huis clos ;

Vu les articles 43 à 58 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958, portant loi organique sur le statut de la magistrature ;

Vu les articles 13 et 14 de l’ordonnance n° 58-1271 du 22 décembre 1958 portant loi organique sur le Conseil supérieur de la magistrature ;

Vu les articles 9 à 13 du décret n° 59-305 du 19 février 1959 relatif au fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature ;

Vu la dépêche de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, du 13 mai 1959, dénonçant au Conseil les faits motivant la poursuite disciplinaire exercée contre M. X, juge au tribunal de V, et les pièces jointes ;

Sur le rapport de M. le premier président Roland ;

Ouï M. X, en ses explications et Me Roubache, avocat au barreau de V, son conseil ;

Attendu qu’il n’y a lieu de faire procéder à enquête ;

Attendu qu’il résulte des pièces du dossier et des débats, et notamment des déclarations faites par M. X devant le président du tribunal de V et renouvelées par lui devant le Conseil supérieur, que M. X, étant juge chargé de l’instruction audit tribunal a, en 1957 et 1958, utilisé pour la satisfaction de besoins personnels des sommes s’élevant au total à 2 206 000 francs, saisies au cours de trois informations ouvertes contre les collecteurs de fonds du F.L.N. et qui lui avaient été remises à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ;

Attendu qu’il les a intégralement restituées ; que si les demandes incessantes d’argent de sa femme et les menaces de mort qui lui avaient été adressées par le F.L.N. ont pu provoquer chez lui quelque désarroi mental, qui atténue dans une certaine mesure sa responsabilité morale, les fautes qu’il a ainsi commises n’en revêtent pas moins une extrême gravité et ne permettent pas à leur auteur de conserver des fonctions de magistrat ;

Attendu, toutefois, que M. X est père de cinq enfants ; qu’il avait été bien noté jusqu’à la connaissance des faits relevés contre lui ; qu’il est également juste de tenir compte, pour apprécier la sanction qui doit être prononcée contre lui, des efforts qu’il a faits pour réparer rapidement le préjudice résultant de ses agissements ;

Par ces motifs,

Prononce contre M. X la sanction disciplinaire prévue par le § 6 (mise à la retraite d’office) de l’article 45 de l’ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958.