Conseil supérieur de la magistrature statuant comme conseil de discipline des magistrats du parquet
La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente pour la discipline des magistrats du parquet, réunie le 26 février 2013, à la Cour de cassation, 5 quai de l'Horloge, Paris 1
Vu l'article 65 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, modifiée ;
Vu la dépêche du procureur général près la cour d’appel d’xxxxx, en date du 5 mars 2012 et ses pièces annexées, saisissant pour avis sur les poursuites disciplinaires diligentées à l'encontre de M. X, la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente pour la discipline des magistrats du parquet ;
Vu les dossiers disciplinaire et administratif de M. X, mis préalablement à sa disposition ;
Vu la convocation adressée le 24 janvier 2013 à M. X et sa notification à l'intéressé le 7 février 2013 ;
Vu la convocation adressée le 24 janvier 2013 à Maître A ;
Vu l'ensemble des pièces produites et jointes au dossier au cours de la procédure.
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L'affaire a été mise en délibéré au 19 mars 2013 à l'issue des débats qui se sont déroulés publiquement dans les locaux de la Cour de cassation le 26 février 2013, au cours desquels, après rappel des termes de la saisine du Conseil par le Président de la formation,
Mme Anne Coquet a présenté son rapport préalablement communiqué aux parties, qui ont acquiescé à ce qu'il ne soit pas intégralement lu ;
M. X a été interrogé sur les faits dont le Conseil était saisi et a fourni ses explications,
M. Eric Corbaux a présenté ses demandes tendant au prononcé d'un avis de déplacement d’office ;
Maître A a été entendu en la défense de M. X qui a eu la parole en dernier, le principe de la contradiction et l'exercice des droits de la défense ayant été assurés.
Aux termes de la saisine du procureur général près la cour d’appel d’xxxxx, il est reproché à M. X, substitut général près ladite cour, d’avoir, à xxxxx, commis des faits de violences volontaires répétés à l’encontre de sa compagne, Mme B, faits commis les 11 mars 2009 ainsi que les 9 et 10 mars 2010.
Il résulte des pièces de la procédure disciplinaire que M. X a été condamné par la cour d’appel de xxxxx, par arrêt en date du 20 février 2012, à la peine de quatre mois d’emprisonnement avec sursis, du chef de violences sur la personne de Mme B, sa concubine avec qui il avait conclu un pacte civil de solidarité en 2006, n’ayant pas entraîné d’incapacité totale de travail s’agissant des faits commis le 11 mars 2009 et ayant entraîné une incapacité n’excédant pas huit jours s’agissant des faits commis les 9 et 10 mars 2010.
M. X s’étant pourvu en cassation, cet arrêt est devenu définitif suite à la décision de non-admission rendue le 5 juin 2012 par la chambre criminelle de la Cour de cassation.
La matérialité des faits constatés par la décision pénale précitée de la cour d’appel de xxxxx à laquelle s’attache l’autorité de la chose jugée, s’impose dès lors au Conseil.
Ces faits constituent incontestablement des manquements à la dignité, à l’honneur et à la délicatesse d’un membre du corps judiciaire, lequel doit, en toute circonstance, y compris de sa vie privée, veiller au respect des devoirs de son état de magistrat.
A l’audience, M. X a expliqué que les faits pour lesquels il avait été condamné s’expliquaient par le caractère « pathogène » de la relation qu’il entretenait avec Mme B, dont il était ce jour séparé, précisant que, depuis la commission de ces faits, il poursuivait son activité professionnelle au parquet général d’xxxxx.
Ces violences commises sur la personne de sa concubine sont, par leur nature même et leur caractère répétitif, particulièrement inadmissibles pour un magistrat, M. X ayant de plus, à l’audience disciplinaire, reconnu avoir, avant les poursuites pénales dont il a fait l’objet, été amené à requérir l’application de la loi pénale dans des procédures de violences intra-familiales.
Elles conduisent le Conseil, en raison de leur gravité, à proposer la sanction de l’abaissement d’échelon.
En outre, si le Procureur général près la cour d’appel d’xxxxx a précisé dans une note du 5 mars 2012 adressée au rapporteur à sa demande, « avoir veillé à ce qu’un minimum de collègues aussi bien au parquet de xxxxx qu’au parquet général soit informé de la situation de M. X », tout en précisant qu’il ne pouvait « garantir que certains d’entre eux n’aient pas eu connaissance des faits imputés à M. X et aient pu les commenter en privé », le Conseil relève, en tout état de cause, que ces faits ont été commis dans le ressort de la cour d’appel au sein de laquelle M. X exerce ses fonctions du ministère public et qu’ils sont de nature à porter atteinte à la crédibilité du magistrat qui exerce l’action publique. Au regard de cette circonstance, le Conseil propose d’assortir la sanction d’abaissement d’échelon du déplacement d’office.
PAR CES MOTIFS,
Après en avoir délibéré à huis clos, et hors la présence de Mme Anne Coquet,
EMET L'AVIS de prononcer contre M. X la sanction d’abaissement d’échelon, assorti du déplacement d’office, en application des articles 45, 2° et 4° et 46 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 précitée,
Dit que le présent avis sera transmis au garde des sceaux et notifié à M. X par les soins du secrétaire soussigné.